Il y a, oh, très longtemps, j’ai lu une pièce, de Giraudoux, je crois – que Dieu ait son âme et la garde, il était mauvais dramaturge – dans laquelle une vieille dame enjoignait à un jeune homme désespéré de lire un article de journal, toujours le même – elle lui tendait d’ailleurs un journal élimé à plusieurs reprises durant la pièce – parce qu’il contenait une bonne nouvelle. « Lisez ça tous les jours, qu’elle disait, en substance. Il faut nourrir son esprit avec de la joie! »
J’avais trouvé ça très … euh, particulier. Pourquoi proposer à un jeune homme éperdu de chagrin de s’accrocher à une toute petite nouvelle positive ? Pourquoi l’encourager à refuser le désespoir, la peine, la douleur ? C’est notre lot d’êtres humains, non? Je ne comprenais pas, moi qui avais fait le choix de la lucidité et du réalisme – du moins je le croyais.
Eh bien, aujourd’hui, quand je me vois revisionner des séries télé que j’ai aimées, je me sens comme cette vieille femme. Le malheur, l’absence, la douleur, on n’a pas besoin de les chercher, ils nous poursuivent comme une meute de chiens affamés. Une petite émission réjouissante, ça a son effet, à la longue. Ça permet d’enligner des jours tout à fait corrects en termes d’émotion. Je suppose que ça remplace, un peu mais pas beaucoup, le fait d’avoir un enfant à la maison – parce qu’un enfant, c’est joyeux – mais ça, c’est un tout autre sujet, non?