Je constate que je ne peux pas écrire sans penser. Si je pensais que je ne peux pas écrire, ma page resterait blanche. Pour écrire, je dois donc penser: « Je peux écrire ».
Avec cela en tête, j’écris sur ma page des histoires plus ou moins dignes de foi qui commencent bien et finissent mal. Elles ont toutes lieu au passé, au présent et au futur mais je ne peux pas les commencer à un autre moment que maintenant. Quand je pense au futur, il se presse de disparaître dans le passé tandis que le présent, habile, s’installe dans un lieu d’attente ou il lui devient possible de défiler sa bobine de fil pour en faire une belle petite pelotte.
Donc, il était une fois un endroit appelé « paradis » dans lequel des êtres naissaient. C’était un très gros nuage d’un blanc virginal qui s’était formé dans le ciel. C’était le seul nuage en cette journée claire. La chaleur du soleil nourrissait les êtres qui apparaissaient au paradis ; ils étaient bien nourris et très contents de leur sort. Il avaient tout en abondance et aucun d’entre eux ne devait chasser pour manger. L’énergie du soleil maintenait la vie dans le nuage blanc.
Lorsque le soleil se coucha, la lune apparut, et le temps, qui n’avait pas été important jusque là, descendit sur les êtres du paradis. Leur nuage fut enveloppé de noirceur.
Privés de la nourriture du soleil, ils commencèrent à s’énerver et à avoir froid. Ils se collèrent les uns contre les autres pour se réchauffer, et se retirèrent dans des cavernes parce qu’il y restait encore de la chaleur.
Lorsque la lune disparut et que le soleil se leva le lendemain, ils restèrent dans ces cavernes, continuant à se réchauffer dans la cohabitation et se nourrissant les uns des autres. Ils avaient revêtu leurs défroques de peur, et étaient dès lors devenus incapables de percevoir le lever du soleil et de recevoir son énergie nue.
Ils restèrent dans les caves et inventèrent des moyens de capturer la chaleur du soleil pour y maintenir la vie. Ils réussirent à capturer tant de chaleur pour éclairer et chauffer leurs grottes sombres que le soleil devint de plus en plus blafard et s’éteignit. Ils n’avaient plus que la chaleur qu’ils avaient capturée. Elle ne dura pas longtemps ; peureux, agités et affamés, les êtres l’utilisèrent jusqu’à ce qu’il n’en reste plus. Tout devint de plus en plus sombre, ils périrent les uns après les autres et ils appelèrent cela la mort.
Leur mort permit à la chaleur de se libérer et de retourner au firmament. Le soleil reprit vie une fois de plus.
Donc, il était une fois un endroit appelé « paradis » dans lequel des êtres naissaient. Le paradis était un très gros nuage d’un blanc très pur qui s’était formé dans le ciel. C’était le seul nuage en cette journée claire.
Monica Hathaway
Traduction : Renée et Maryse Pelletier